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Photo du rédacteurJuan Echeverria

Ode à mon ravisseur


Ô toi tendre poison si cher à mes parents

Toi qui fut ma nourrice, mon ami, mon amant

Venin au doigts de fée caressant mon visage

Toi que je découvris caché dans le nectar

De l’orange sanguine, sucre de mon désespoir

Grace à qui en vingt ans, personne ne me vit sage

Ose croire qu’à présent et malgré mon absence

Lors de nuits sans boussole, lorsque le diable danse

Il m’arrive de rêver à reprendre le large



Toi qui fut le remède à ma timidité

Qui transforma mon père en clochard hébété

Ma compagne perverse, ma nymphe tant adorée

Souvent marchant pour moi, me portant dans tes bras

A l’heure où les ruelles n’acceptent que les rats

Me réchauffant le coeur de tes rayons dorés

Sache que parfois je sors, à Belleville à minuit

Dans l’espoir de te voir, dans le regard d’autrui

Je t’aimais comme Cayenne ou l’île de Gorée



Aimable premier verre, vulgaire première bouteille

Ce n’est qu’avec le nombre qu’arrivaient les merveilles

Ma ville en fût témoin tout comme mon dos brisé

Pour toi je fus voleur, pour toi je fus brigand

Pour te serrer la main, je retirais mes gants

Et j’ai vomis caché, de peur d’être méprisé

Devenu ton pantin, mon avenir non loin

Ecrit sur les horaires du commerçant du coin

Car sur notre divorce personne n’aurait misé



Au goulot des années, s’est éteinte la Gaîté

Comme du papier jaunis, nos visages dévastés

Car je n’étais pas seul, d’autres m’accompagnaient

Combien de naufragés, oui j’en ai vu dormir

Sur le banc d’un jardin, et en hiver mourir

Au réveil du cauchemar, la lumière j’éteignais

Tout ce que je cherchais était pourtant si proche

Je l’ai perdu, je sais, mon coeur me le reproche

L’époque où chaque matin ma maman me peignait

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